En 2013, 46% des émissions mondiales de CO2 dues à la combustion d’énergie sont imputables au charbon. (©photo)
L’impact environnemental du charbon a été dénoncé à de nombreuses reprises durant la COP21 qui s’est tenue en décembre 2015 à Paris. La consommation mondiale de cette énergie a toutefois augmenté de plus de 24% entre 2005 et 2014 et l’AIE prévoit qu’elle continuera à croître légèrement d’ici à 2040. Au-delà des déclarations d'intentions, quel est l’avenir du charbon ?
Le charbon aujourd’hui dans le monde
Le charbon est la deuxième source d’énergie dans le monde après le pétrole : elle compte pour près de 28,9% de la production mondiale d’énergie primaire selon les dernières statistiques de l’AIE portant sur 2013. Le charbon génère en particulier 41% de l’électricité mondiale, ce qui en fait la principale source électrique.
Mix énergétique mondial en 2013 (©Connaissance des Énergies)
La Chine absorbe à elle seule près de la moitié de la production et de la consommation mondiale de charbon(1). Depuis 2000, près de 80% de la hausse de la demande de charbon dans le monde provient de ce pays. Pour la première fois au XXIe siècle, la consommation chinoise de charbon a toutefois baissé en 2014 (- 2,9%) et cette tendance serait plus prononcée en 2015 d’après l’AIE.
Avec la transition économique de la Chine intégrant davantage le secteur des services, la hausse de la demande nationale d’électricité (+ 3,8% en 2014) n’est plus aussi corrélée à la croissance du pays (+ 7,4% en 2014) que dans le passé. Confrontée à d’importants problèmes de pollution atmosphérique dont il a été largement question le mois dernier et à un ralentissement économique de ses industries fortement consommatrices de charbon (acier, ciment), la Chine a annoncé qu’elle comptait fermer près d’un millier de mines de charbon en 2016, un niveau similaire à 2015. Le charbon devrait toutefois encore compter pour près de 62,6% du mix énergétique chinois en 2016(2).
Une consommation encore en hausse portée par l’Inde
Malgré la fin de « l’âge d’or » du charbon en Chine, la demande mondiale devrait selon l'AIE encore augmenter de 0,8% par an en moyenne d'ici à 2020. Elle sera tirée par les pays d’Asie du Sud-Est (Indonésie, Malaisie, Vietnam, Philippines, etc.) et surtout par l’Inde dont devrait provenir la moitié des nouvelles consommations de charbon. Cette énergie est identifiée par le gouvernement indien comme l’option la plus économique pour donner accès à l’électricité aux 240 millions de personnes qui en sont encore privées dans le pays et pour développer son industrie manufacturière. L’AIE note toutefois que les industries lourdes intensives en charbon jouent un rôle moins important en Inde et en Asie du Sud-Est qu’en Chine.
La demande de charbon devrait chuter dans les pays développés, en particulier aux États-Unis (2e consommateur mondial) et, dans une moindre mesure, en Europe. Rappelons que l’Australie est et restera dans les prochaines années le principal exportateur de charbon dans le monde.
Évolution de la consommation de charbon par zone géographique (©Connaissance des Énergies d'après AIE)
Compte tenu de la hausse de la production globale d’électricité d’ici à 2020, l’AIE estime que la part du charbon diminuera dans le mix électrique mondial, à hauteur de 37% à cet horizon.
Rappelons par ailleurs que les réserves prouvées de charbon atteignent plus de 891 milliards de tonnes dans le monde à fin 2014 selon BP, ce qui équivaut à environ 110 ans de production mondiale au rythme actuel (le ratio est de 52 ans et demi pour le pétrole et de 54 ans pour le gaz en l'état des réserves prouvées).
Des prix du charbon toujours bas…comme ceux du gaz
Avec le développement du gaz de schiste aux États-Unis, d’importants volumes de charbon sont arrivés sur le marché et ont contribué à faire baisser les cours. La demande de charbon en baisse en Chine a également provoqué une situation de surcapacité dans ce pays. Les faibles cours du pétrole ont enfin un impact sur les prix du charbon puisque l’exploitation minière consomme elle-même des produits pétroliers. L’AIE ne prévoit pas de remontée des cours du charbon d’ici à 2020.
Évolution des prix du charbon (©Connaissance des Énergies d'après AIE)
Notons toutefois que les centrales à charbon subissent la concurrence des centrales à gaz, ces dernières ayant également vu le coût de leur combustible baisser. Le gaz grignote ainsi la part du charbon dans certains pays comme le Royaume-Uni.
Les exigences accrues en matière d’émissions de gaz à effet de serre (couplées à la mise en place de bourses ou de taxes carbone) et l’accélération des annonces de désinvestissements assombrissent par ailleurs les perspectives des centrales à charbon. L’émergence de systèmes de capture et le stockage du CO2 n’est certes plus une solution théorique selon l’AIE (plusieurs projets commerciaux existent déjà en Amérique du Nord, en Australie et en Chine) mais leur déploiement à grande échelle nécessiterait des politiques fortes alors que les priorités de nombreux pays semblent porter sur d’autres énergies.
A plus long terme, la croissance de la demande mondiale de charbon devrait ainsi se ralentir selon le scénario de référence de l'AIE (+ 0,4% par an d’ici à 2040 contre + 2,4% lors des deux dernières décennies). L’Agence envisage que le charbon tant décrié demeure la principale source d’électricité en 2040 en générant encore près de 30% de l’électricité mondiale à cet horizon(3) même si la Conférence Climat de Paris a renforcé les incertitudes quant à la future demande.
Pour rappel, le respect de l’objectif de la COP21 (réchauffement climatique limité à 2°C d’ici à 2100 par rapport aux températures préindustrielles) implique de limiter les émissions mondiales de gaz à effet de serre à environ 1 000 milliards de tonnes d’équivalent CO2, soit l’équivalent d’environ 20 ans d’émissions mondiales au rythme actuel.