Laurent Fabius, président de la COP21, lors de la dernière séance plénière de la Conférence Climat de Paris. (©flickr-UNclimatechange)
La COP21 s’est achevée samedi soir sous les applaudissements avec un accord de 195 pays pour lutter contre les émissions de gaz à effet de serre. Quels en sont les termes finaux et les conséquences en matière d’énergie ?
« Nettement en dessous » de 2°C d’ici à 2100
L’ambition finale de l’accord de Paris est de maintenir l’augmentation de la température mondiale « nettement en dessous » de 2°C d’ici à 2100 par rapport aux niveaux préindustriels (article 2 de l’accord) et de poursuivre les efforts en vue de limiter cette augmentation à 1,5°C, une revendication des pays les plus vulnérables au changement climatique. Concrètement, le respect de la trajectoire de 2°C implique de réduire les émissions mondiales de gaz à effet de serre de 40% à 70% d’ici à 2050 par rapport au niveau de 2010 selon les estimations du GIEC.
A l’heure actuelle, 188 pays, dont le Venezuela samedi, ont déposé auprès des Nations Unies des contributions nationales (INDC) exposant leurs objectifs de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre. La somme de ces engagements conduit à une trajectoire de réchauffement proche de 3°C à l’horizon 2100 selon les estimations actuelles.
Des ambitions à réviser
Il a donc été décidé de mettre en place un mécanisme de révision des contributions tous les 5 ans. Un bilan des actions menées par chaque pays sera ainsi effectué en 2023 (article 14) lors d’une COP et les Parties devront revoir à la hausse leurs engagements en 2025, puis tous les cinq ans sauf décision contraire conclue lors d’une prochaine Conférence Climat. Notons que la « Coalition pour une haute ambition », constituée d’une centaine de pays dont les États-Unis et les États membres de l’Union européenne, prévoit de s’engager à une révision des INDC en 2020.
Rappelons que les INDC sont fixées par les États eux-mêmes et qu’ils n’ont pas de valeur juridiquement contraignante, étant uniquement soumis à une « pression des pairs ». L’accord de Paris souligne par ailleurs à nouveau le principe des « responsabilités communes mais différenciées » (article 2) selon lequel les pays développés doivent assumer leur responsabilité historique face au changement climatique et « montrer la voie en assumant des objectifs de réduction des émissions en chiffres absolus » (article 4).
Un plancher de financements pour les pays du Sud
L’accord de Paris à proprement parler porte sur la période après 2020 et il est précédé dans le texte remis samedi de « décisions » pouvant être révisées chaque année lors des différentes COP. C’est parmi ces décisions qu’est abordée la question très sensible des financements : il est prévu que les 100 milliards de dollars par an de financements des pays développés aux pays du Sud constituent « un plancher » à partir de 2020. Ce niveau devra être révisé à la hausse au plus tard en 2025.
L’accord de Paris sera ouvert à la signature au siège des Nations Unies à New York durant un an à partir du 22 avril 2016, journée de la Terre (article 20). Pour entrer en vigueur en 2020, il devra avoir été ratifié, accepté ou approuvé par 55 Parties au minimum comptant pour au moins 55% des émissions mondiales de gaz à effet de serre (article 21).
L’énergie pas explicitement mentionnée dans l’accord final
Il n’est fait qu’une fois mention à l’énergie dans le texte final de la COP21 (dans la partie précédant l'accord). Dans le préambule, il est reconnu « la nécessité de promouvoir l'accès universel à l’énergie durable dans les pays en développement, en particulier en Afrique, en renforçant le déploiement des énergies renouvelables ». L'objectif de développement des renouvelables (éolien et photovoltaïque en tête) est également cité dans de très nombreuses INDC, souligne l’IRENA.
En clôture de la COP, Laurent Fabius a expliqué de façon diplomate que l’accord de Paris devait permettre d’accompagner « les producteurs d’énergies fossiles dans leurs efforts de diversification technologique et économique ». La tarification du carbone, devant faciliter cette diversification, est notamment citée dans le texte final comme un outil incitant à la réduction des émissions.
La COP21 au Bourget aura finalement duré 13 jours. (©flickr-UNclimatechange)
Plus de renouvelables et une meilleure efficacité énergétique
Selon Richard Black, directeur du think tank britannique ECIU (Energy and Climate Intelligence Unit), les pays miseront principalement sur l’efficacité énergétique pour atteindre leurs objectifs de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Dans le secteur électrique, les trois options qu’il identifie pour une transition énergétique sont la capture et le stockage de CO2, le nucléaire et les énergies renouvelables. Selon lui, « personne ne construit de système de capture et de stockage de CO2 sur des centrales électriques et seules la Chine, l’Inde et la Russie investissent fortement dans le nucléaire » (avec respectivement 21, 9 et 6 réacteurs en construction).
Pour la plupart des pays, le développement des énergies renouvelables constituera donc l’élément central des futures stratégies énergétiques, « d’autant plus avec la baisse des coûts des renouvelables et eu égard à la rapidité de construction de ces unités de production » selon Richard Black. Dans ces conditions, un enjeu central consistera à développer des solutions de stockage d’énergie pour accompagner le développement des énergies intermittentes.
L’Agence Internationale de l’Énergie (AIE) salue l’Accord de Paris comme « une étape historique pour le secteur énergétique mondial », accélérant le transfert des investissements vers les énergies « propres » et l’efficacité énergétique. Elle estime que ces investissements devraient s’élever, au niveau mondial, à 13 500 milliards de dollars d’ici à 2030 pour que les pays respectent leurs INDC.
Quel mix énergétique pour demain ?
Lors de la COP21, l’objectif de mix 100% renouvelables à l'horizon 2050 a été défendu par de nombreuses ONG et par des villes. Pour y parvenir, l’association négaWatt estime notamment qu’une plus grande sobriété énergétique pourrait jouer un rôle aussi important que l’efficacité énergétique en France.
Ces objectifs restent encore assez éloignés des dernières prévisions de l’AIE présentées juste avant la COP21. L’Agence y envisage bien que les énergies renouvelables deviennent la première source d’électricité dans le monde devant le charbon au début des années 2030 mais elle prévoit que la production mondiale d'énergie primaire repose encore à près de 75% sur les énergies fossiles en 2040 (contre 81,4% en 2013).
Mix énergétique mondial en 2013 (©Connaissance des Énergies)