Professeur émérite à l’Université Paris-Dauphine
Senior associé au Cambridge Energy Research Associates (IHS-CERA)
Le rôle actif des collectivités locales s’affirme aujourd’hui comme essentiel dans la politique énergétique. Les citoyens souhaitent promouvoir des actions décentralisées sur l’accroissement de l’efficacité énergétique, l’organisation des transports, l’utilisation accrue de ressources locales pour la production d’énergie. Il y a là un potentiel important d’emplois non délocalisables.
Le débat français sur la transition énergétique arrive à un moment très particulier de l’Histoire de l’énergie. La communauté scientifique internationale nous lance des avertissements pressants sur l’aggravation du réchauffement climatique qui met en péril l’état de la planète. Notre système énergétique, fondé à près de 90 pour cent sur des énergies carbonées, doit basculer le plus rapidement possible vers un système plus efficace, plus intelligent, moins intense en carbone. La transition énergétique s’inscrit dans une dynamique historique incontournable dont il faudrait accélérer le rythme.
Ce qui paraît nouveau dans le débat français, c’est le rôle important assigné aux collectivités locales qui, d’ores et déjà, alimentent le débat par les plans qu’elles ont élaborés (Plans régionaux Climat-Air-Energie) et par de nombreuses réalisations. Trois idées émergent : une prise de conscience qui alimente une volonté d’action, une multiplication des initiatives créatrices, le défi d’articuler des systèmes décentralisés à nos grands systèmes interconnectés.
Au niveau local, les citoyens manifestent la volonté de participer activement à la définition de l’univers quotidien dans lequel ils vivent : qualité de l’eau qu’ils boivent et de l’air qu’ils respirent, organisation des transports, traitement des déchets, utilisation des ressources locales pour des besoins locaux. Cette volonté est très généralement marquée par un souci de promouvoir une meilleure efficacité énergétique, des modes de production et de consommation plus sobres dans une optique de développement durable.
On assiste effectivement à la multiplication de projets énergétiques locaux qui concernent aussi bien la demande que l’offre : amélioration de l’efficacité et maîtrise de la demande dans les bâtiments et l’éclairage public, production d’électricité et de chaleur à partir de la biomasse, du traitement des déchets, de la méthanisation, du développement des énergies renouvelables souvent de façon volontariste et participative. Ces systèmes permettent de s’affranchir, au moins partiellement, des variations du prix du pétrole et ils constituent par ailleurs un gisement non négligeable de création d’emplois non délocalisables.
La multiplication de sous-sytèmes énergétiques décentralisés pose le problème de leur raccordement aux réseaux existants de gaz et d’électricité. Il ne s’agit nullement de remplacer les systèmes centralisés par des systèmes décentralisés mais de combiner les deux approches de façon à accroître l’utilisation des ressources locales disponibles. Cette combinaison exige une intelligence nouvelle pour insérer dans des smart grids les installations de production et de stockage décentralisées ainsi que les smart buildings et les smart homes.