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La pompe à chaleur, procédé déjà ancien consistant à prélever les calories dans l'air ou le sol pour chauffer les bâtiments, connaît un regain d'intérêt, poussée par les politiques afin de réduire notre dépendance aux combustibles fossiles.
L'Agence internationale de l'énergie (AIE) elle-même y voit "une technologie critique pour décarboner le chauffage". Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, le monde devrait passer de 190 millions d'unités aujourd'hui à 600 millions d'ici 2030, couvrant 20% des besoins de chaleur, préconise-t-elle. Alors, tenons-nous là une solution miracle ?
Comment ça marche ?
"Ce n'est pas un miracle, mais de la thermodynamique utilisant des calories disponibles et gratuites," dit David Bonnet, de l'Association française pour la pompe à chaleur (Afpac). Ces calories sont récupérées dans le sol (géothermie de surface), les nappes phréatiques, ou l'air extérieur, transportées via des fluides frigorigènes. Un compresseur relève leur niveau de température pour les céder ensuite au circuit de chauffage du bâtiment.
Ces équipements fonctionnent quasiment tous à l'électricité. Mais la quantité de chaleur produite est supérieure à l'électricité qu'ils consomment, ce qui les rend bien plus efficaces, énergétiquement, qu'un radiateur électrique. On distingue les "PAC" air-eau, pour radiateur standard ou plancher chauffant-rafraîchissant. Et la version air-air, qui transmet la chaleur via un système de ventilation ; réversible, elle peut rafraîchir.
Le procédé, mis au point par un Américain dans les années 1930, a fait florès aux États-Unis dès après la guerre, pour le chaud et le froid.
Décennie florissante
Le secteur en France se réjouit de voir son heure venue, car "l'environnement devient la préoccupation de tous et on comprend que les énergies fossiles vont être plus chères". Les dernières années ont été florissantes. Désormais la France compte 5 millions de PAC, dont plus d'un million vendues en 2021, selon l'Afpac.
Cela avait commencé timidement au choc pétrolier, raconte David Bonnet, qui a construit en 1975 en France la première machine issue d'un brevet de General Electric. Mais la demande a longtemps stagné, variant au gré des prix du fioul, des aides, des opérations de promotion tentées par EDF, pâtissant aussi d'acteurs peu fiables attirés par l'effet d'aubaine.
In fine, les trois fabricants nationaux ont été rachetés par des marques étrangères. Ce n'est que ces dernières années que le pays voit revenir des usines, assemblant des machines aux composants plus ou moins hexagonaux.
Ambitions
Le secteur se verrait bien accélérer, notamment sur l'habitat collectif, dans un pays plutôt favorable à l'électricité et comme le permet la dernière réglementation sur les constructions neuves.
Plus sélective, l'agence publique française de l'environnement Ademe, qui soutient collectivités et entreprises dans l'essor de la chaleur "verte", souhaite accélérer les projets de géothermie de surface, "au vaste potentiel encore inexploité", explique Bénédicte Genthon, sa directrice adjointe pour la bioéconomie.
Leur "grand atout est d'exploiter l'inertie thermique du sous-sol, à environ 10-15°C toute l'année (...) Cela permet aussi le rafraîchissement l'été sans contribuer aux îlots de chaleur urbains", souligne Mme Genthon, ajoutant que cette option offre une meilleure performance qu'une PAC puisant dans l'air, en particulier par grand froid.
Et limites
Pour l'Ademe, "pour le chauffage des bâtiments, l'idée est d'étudier les meilleures sources disponibles en fonction du contexte local", résume Mme Genthon, "en privilégiant le raccordement à un réseau de chaleur, puis la chaleur de récupération (par exemple sur des unités de valorisation énergétique des déchets), la géothermie et enfin le bois-énergie".
Les obstacles à la PAC, le secteur les voit surtout dans l'intégration des éléments extérieurs sur le bâti, et parfois le temps de rentabilisation de certains projets. La majorité des pompes à chaleur sont aussi dotées d'un chauffage d'appoint, y compris parfois le maintien parallèle des chaudières au fioul, admet M. Bonnet.
Avec la montée du prix de l'électricité, Julien Guillemoto, infirmier dans l'Isère, mise aujourd'hui sur un poêle à bois. Mais il reste content de sa pompe à chaleur, rentabilisée en cinq ans. "Il vaut mieux avoir une maison bien isolée", dit-il. Il lui a aussi fallu un temps d'apprentissage : "au début je visais 20°C, c'était trop chaud. On s'est finalement fixé à 17°C. Et j'ai ajouté une couche de carrelage sur le plancher chauffant".