Mi-2019, plus de 5 500 éoliennes offshore dans le monde étaient connectées aux réseaux électriques de 17 pays. (©Siemens-Gamesa)
L’éolien offshore « va se développer de manière impressionnante au cours des deux prochaines décennies », prédit l’Agence internationale de l’énergie (AIE) dans un rapport(1) dédié à la filière publié le 25 octobre.
0,3% de la production mondiale d'électricité en 2018
Avec 67 TWh générés dans le monde en 2018 (dont environ 60 TWh dans l’Union européenne), l’éolien offshore a compté pour seulement 0,3% de la production électrique mondiale l'an dernier. Selon l’AIE, la filière a toutefois « le potentiel technique de produire plus de 420 000 TWh par an au niveau mondial », soit l’équivalent de 11 fois la demande mondiale d’électricité estimée en 2040 par l’Agence(2). À ce titre, le directeur exécutif de l’AIE Fatih Birol a qualifié de « quasi illimité » le potentiel de la filière.
Selon les prévisions plus « réalistes » de l’AIE (basées sur les politiques annoncées), les capacités éoliennes offshore dans le monde vont être multipliées par 15 d’ici à 2040, faisant l’objet de près de 1 000 milliards de dollars d’investissements cumulés durant cette période. L’AIE estime que l’éolien offshore pourrait produire au niveau mondial près de 1 280 TWh en 2040, soit environ 3,1% de la production globale d'électricité par an envisagée à cet horizon. Près de 150 nouveaux projets dans le monde devraient être finalisés dans les 5 prochaines années, rappelle l’AIE (dont en France où sont encore attendues les mises en service des premiers grands parcs offshore).
Les baisses des coûts(3), l’installation d’éoliennes de plus grande taille et de plus grande puissance et le développement des fondations flottantes vont ouvrir de nouvelles perspectives à l’éolien offshore selon l’AIE : la filière pourrait ainsi constituer le nouveau « game-changer du système énergétique », au même titre selon Fatih Birol que « la révolution du schiste et l’essor du solaire photovoltaïque » au cours de la dernière décennie.
La hauteur des éoliennes offshore a environ doublé entre 2010 et 2016. La surface balayée par les pales des nouvelles installations (diamètre indiqué en orange sur l'infographie) devrait encore sensiblement augmenter dans les prochaines années. (©Connaissance des Énergies, d'après AIE)
L’Union européenne et la Chine, principales zones de développement
La filière éolienne offshore s’est historiquement développée dans l’UE, en particulier au large des pays bordant la mer du Nord (avec des fortes ressources en vents et de faibles profondeurs d’eau). S’appuyant sur un soutien public, les capacités éoliennes installées dans les eaux européennes atteignaient près de 19 GW à fin 2018 (sur 23 GW installés au niveau mondial). Selon les estimations « centrales » de l’AIE, ces capacités pourraient s’élever à 127 GW en 2040(4) et l’éolien offshore pourrait compter pour 15,9% de la production annuelle d’électricité de l’UE à cet horizon (contre 1,8% en 2018).
La Chine va elle aussi « jouer un rôle majeur dans le développement à long terme de l’éolien offshore », notamment dans le cadre de ses efforts pour réduire la pollution de l’air. C’est déjà dans ce pays qu’ont été installées les plus importantes capacités éoliennes offshore en 2018 (1,6 GW). Aux environs de 2025, la Chine pourrait disposer des principales capacités éoliennes offshore cumulées devant le Royaume-Uni selon l’AIE. À l’horizon 2040, la puissance installée du parc éolien offshore chinois pourrait atteindre 110 GW (contre 4 GW à fin 2018) mais avec une part de la filière dans le mix électrique encore inférieure à 3% à cet horizon. L’AIE estime que les installations éoliennes offshore seront compétitives avec les nouvelles centrales à charbon en Chine « aux alentours de 2030 ».
Les États-Unis bénéficient d’un gisement éolien offshore important « dans le nord-est du pays et près des grandes zones de consommation le long de la côte est » et pourraient porter à 146 TWh la production électrique provenant de cette filière en 2040 (soit 2,9% du mix de production électrique estimé cette année-là).
L’UE, la Chine et les États-Unis pourraient compter ensemble pour 82% de la production électrique d’origine éolienne offshore en 2040 selon le scénario central de l’AIE. L’Agence cite par ailleurs l’Inde, la Corée du Sud et Taïwan parmi les pays ayant fixé des objectifs ambitieux pour la filière, auxquels peuvent être ajoutés le Japon et le Canada.
Une filière à production variable mais…
La production de la filière éolienne offshore est intermittente mais les facteurs de charge des nouvelles installations atteignent des niveaux moyens de 40% à 50%. La variabilité de la production éolienne offshore est par ailleurs bien plus faible que celle des installations éoliennes terrestres ou solaires : elle « fluctue généralement […] jusqu’à 20% d’heure en heure » (« jusqu’à 40% pour le solaire photovoltaïque »).
Malgré leur production intermittente, les installations éoliennes offshore pourraient ainsi rendre des services au système électrique similaires aux installations dites « de base » (centrales nucléaires, hydroélectriques, thermiques à combustible fossile, etc.) selon l’AIE. L’Agence estime par ailleurs que ces installations « ont l’avantage d’éviter la plupart des problèmes d’usage des terres et d’acceptabilité que rencontrent les autres filières renouvelables variables ».
L’AIE appelle les gouvernements et l’industrie à poursuivre leurs efforts afin de permettre à l’éolien offshore de devenir « un pilier des transitions énergétiques » bas carbone. L’Agence souligne les énormes opportunités, notamment pour les groupes pétroliers et gaziers qui peuvent s’appuyer « sur leur expertise en offshore »(5). Le succès de l’éolien offshore dépendra également du développement des infrastructures de transport électrique, rappelle l’Agence : « que la responsabilité du développement (et le financement) de la transmission en mer incombe aux développeurs de projets ou aux gestionnaires de réseaux, la réglementation devra encourager une planification qui soutienne le développement à long terme » de la filière, souligne l’AIE.