- Source : Ifri
Depuis la mise en service au Danemark du premier parc éolien offshore au monde en 1991 (Vindeby(1)), la filière éolienne offshore s’est très fortement développée en mer du Nord, en profitant d’un excellent régime de vents et d’une faible profondeur des eaux (inférieure à 50 m). À fin 2017, cinq pays bordant la mer du Nord (Allemagne, Belgique, Danemark, Pays-Bas, Royaume-Uni) comptaient à eux seuls pour 82% des capacités éoliennes offshore installées dans le monde.
Dans cette étude publiée le 16 juillet par le Centre Énergie de l’Ifri, Michel Cruciani(2) rappelle les raisons qui ont fait de la mer du Nord « le berceau de l’éolien offshore » et les conditions qui en feront encore « la locomotive de la filière » dans les années à venir. Il fait état de l’évolution des coûts - en forte baisse - des parcs et souligne l’importance de l’adaptation des réseaux électriques dans le contexte d’une intégration croissante des installations éoliennes offshore.
Michel Cruciani souligne entre autres la forte concentration du secteur éolien offshore en Europe à la suite de fusions et de regroupements. Près de 84% des capacités éoliennes offshore dans cette zone ont été fournies par deux constructeurs : Siemens Gamesa Renewable Energy (65%) et Vestas (19%). De nombreux acteurs extra-européens viennent « acquérir des connaissances sur place, avant une éventuelle réplication sur leur territoire national ou dans des pays tiers », par exemple le groupe Northland Power qui a acquis 60% des parts de la ferme Gemini aux Pays-Bas.
La recherche d’innovations en mer du Nord est qualifiée d’ « incomplète » en raison des conditions très favorables de cette zone. Près de 80% des ressources éoliennes offshore dans le monde seraient en effet situées dans des eaux d’une profondeur supérieure à 60 mètres, nécessitant le recours à l’éolien flottant (la seule ferme flottante pleinement opérationnelle, Hywind, est située en Écosse).
En matière de coûts d’installation, Michel Cruciani souligne que le prix de la turbine ne compte que pour 32% des dépenses liées à l’investissement initial (CAPEX), le transport et le montage et l’infrastructure électrique pesant aussi lourd dans cet investissement. La baisse généralisée des prix annoncés du MWh de l'éolien en mer du Nord est soulignée, avec des projets passant en dessous de la barre des 65 €/MWh, « considérée comme le seuil de compétitivité par rapport à l’installation concurrente de référence(3) ».
Au-delà de la baisse des coûts des nouvelles installations, Michel Cruciani souligne que sont rarement évoqués « les coûts des réseaux de transport nécessaires pour évacuer les volumes croissants d’électricité produite […] et encore plus rarement la coordination temporelle entre la construction des fermes en mer et celle des réseaux ». Pour réduire les coûts des raccordements, l’idée d’un grand « hub » commun à plusieurs parcs éoliens offshore avec un seul câble d’interconnexion a été émise. Une solution toutefois jugée « hors d’atteinte » par Michel Cruciani en raison des fortes différences entre pays et de l’absence d’une instance de coordination régionale.
En France, rappelons que le gouvernement a choisi d’implanter les 5 premiers parcs éoliens offshore en Atlantique et dans la Manche. Les projets lauréats ont été désignés dans le cadre d’appels d’offres en 2011 et 2013, avec un tarif d’achat garanti sur 20 ans. Suite à de nombreux recours d’associations de riverains et face à la baisse des coûts de la filière, les tarifs d’achat initialement accordés ont été renégociés par le gouvernement : « au terme de la négociation, fin juin 2018, le prix s’établit autour de 150 €/MWh, le coût du raccordement étant transféré au gestionnaire du réseau de transport, RTE ».
En dehors de l’Europe, seule la Chine détenait un parc éolien offshore significatif à fin 2017, avec 2,8 GW en service. (©Connaissance des Énergies)
- 11 éoliennes de 0,45 MW de puissance unitaire.
- Chargé de mission au Centre de géopolitique de l’énergie et des matières premières (CGEMP) de Paris-Dauphine et chercheur associé au Centre Énergie de l’Ifri, Michel Cruciani est notamment spécialiste des dispositifs de soutien aux énergies renouvelables et du marché européen de l'électricité.
- Centrale à gaz à cycle combiné avec un prix du CO2 de 20 € par tonne.