Masdar City, ville du futur ? (©photo)
Sommaire
Définition
Située à Abou Dhabi (Émirats arabes unis(1)), Masdar ou « source » en arabe est une éco-cité à vocation expérimentale dans les domaines des énergies renouvelables, des transports « propres » et de la gestion des déchets. Le projet est toujours en développement, les travaux de la ville ayant commencé en février 2008(2). Masdar City est censée accueillir 40 000 habitants à l'horizon 2030 selon les dernières estimations.
Appelée à devenir une ville modèle, Masdar City a l'ambition de devenir la première cité avec une vie « sans émissions de carbone et sans déchets ». Cette ville est localisée à 30 km à l’est de la ville d’Abou Dhabi, à proximité de son aéroport international.
Contexte énergétique
À l’heure actuelle, l’économie d'Abou Dhabi repose encore principalement sur les exportations de pétrole. La rente pétrolière confère à cet émirat et plus généralement aux Émirats arabes unis (membre de l'OPEP disposant des 8e réserves de pétrole et de gaz naturel au niveau mondial) une capacité d’investissement importante.
Au cœur de ces investissements, Masdar City a valeur de symbole et de positionnement stratégique. L’objectif du projet, créé par le gouvernement d’Abou Dhabi, est de positionner la ville comme un pionnier en matière d’énergies renouvelables et d’incarner la « transition énergétique ».
Ce projet s’inscrit dans le programme Abu Dhabi Economic Vision 2030(3) qui vise à transformer le modèle économique de l'émirat à l’horizon 2030. À l’origine basé sur les ressources naturelles, celui-ci évoluerait vers une économie fondée sur la connaissance et l’innovation.
Principes fondateurs de la ville
Un pôle d’excellence technologique
L’objectif de la ville est d’inciter étudiants, experts, hommes d’affaires, spécialistes de l’environnement et entreprises innovantes de tous les pays à venir s’y installer (à l'image du projet NEOM en Arabie saoudite). Le Masdar Institute, dédié à la recherche et créé avec le soutien du Massachusetts Institute of Technology (MIT), a été initié en 2007. Les premiers étudiants et chercheurs y ont investi une partie des lieux dès novembre 2010. En 2017, l'institut a fusionné avec la Khalifa University of Science, Technology and Research (KUSTAR) et l'Institut du pétrole (il est désormais appelé « Masdar City Campus of Khalifa University »(4)).
Une cité alimentée par les énergies renouvelables
Parmi les infrastructures et projets initialement envisagés dans le cadre de Masdar City figurent :
- la construction d’une centrale solaire d’une puissance de 100 mégawatts, équipée de 768 miroirs paraboliques sur 2,5 km2 (investissement de 350 millions de dollars). Sa puissance doit être ultérieurement portée à 500 MW ;
- la couverture des toits de la ville de 5 000 m2 de panneaux photovoltaïques ;
- le recours à l'hydrogène et à des agrocarburants issus de cultures utilisant les eaux usées pour remplacer les carburants fossiles ;
- l'utilisation des eaux usées, après recyclage, pour l'irrigation des cultures destinées à l'alimentation. Ce recyclage de l’eau est censé permettre de réduire de 80% la consommation d’eau de mer dessalée dont la production nécessite une quantité importante d’énergie ;
- la construction d'une ferme éolienne de 20 MW ;
- l'utilisation du surplus d’énergies renouvelables produit par la ville d’Abou Dhabi.
Des transports « propres » et optimisés
La mise en place d’un système de transports « propre » à haute efficience énergétique et sans émissions de gaz à effet de serre va être mis en place : le PRT (Personal Rapid Transit). Il s’agit d’une nouvelle technologie rapide, à la frontière des transports collectif et individuel.
Avec des cabines de taille moyenne (1 à 10 personnes), les véhicules se déplacent automatiquement à la demande selon une voie définie. Les flux peuvent être optimisés en fonction du trafic et des trajets possibles. Déjà en place à l’aéroport d’Heathrow à Londres, ce mode de transport permet outre l’acheminement des passagers d’assurer le fret en ville ainsi que l'évacuation des déchets.
En théorie, aucun habitant n’aura plus de 200 mètres à parcourir au sein de Masdar City pour accéder aux commerces et aux services de proximité. La marche à pied et le vélo seront privilégiés comme moyens de transport.
Une architecture adaptée à l’environnement de la ville
L’architecture de la ville croise les technologies nouvelles et l’architecture traditionnelle arabe. Sa conception intègre notamment :
- des ruelles étroites et ombragées, rafraichies par un réseau de cours d’eau ;
- des « couloirs » ventés traversant la ville de part en part pour une aération naturelle afin de favoriser l’apparition d’un « microclimat » ;
- un plan général de type traditionnel, carré, entouré de murs destinés à protéger des vents chauds du désert ;
- des constructions basses et équipées de panneaux solaires sur les toits utilisant la climatisation naturelle ;
- des fenêtres reproduisant le principe des moucharabiehs.
Chiffres clés
- Superficie : 6 540 hectares
- Date de livraison initialement prévue : 2016
- Nombre d’habitants initialement attendus: 50 000 (dont 600 étudiants et 40 000 travailleurs), ce chiffre a été revu à 40 000 habitants à l'horizon 2030
- Potentiel d’installation : 1 500 entreprises
- Coût initial de la nouvelle cité : environ 22 milliards de dollars
- Répartition annoncée de la superficie de la première phase de construction de la ville : près de 40% pour l’habitat, près de 39% pour les activités commerciales, près de 5% pour les services collectifs et culturels, 16% pour l'Institut Masdar pour les sciences et la technologie.
Acteurs majeurs
Entreprises et institutions sont au cœur du projet .
Maîtrise d’ouvrage :
Masdar – Abu Dhabi Future Energy Company et Mubadaia developpement Company.
Maîtrise d’œuvre, conception de la ville : Agence Foster and Partners
La ville dans sa globalité (plan directeur) a été imaginée par le cabinet britannique de design et d’architecture Foster and Partners dirigé par Norman Foster.
Conception du centre ville : Laboratory for Visionary Architecture (LAVA)
En août 2009, l'agence d'architecture LAVA (Laboratory for Visionary Architecture) a remporté le concours d'aménagement du centre ville de Masdar. Choisi par un jury d’experts dont Norman Foster, maître d’œuvre du projet Masdar City, le projet de l’agence Laboratory for Visionary Architecture propose des systèmes énergétiques innovants (toitures, matériaux, éclairages publics, etc.).
Entreprises initialement associées
- Énergies renouvelables : ETA-Florence Renewable Energies
- Ingénieur climat : Transolar (Allemagne)
- Structure développement durable : WSP Energy
- Transports : Systematica (Italie)
- Budget : Cyril Sweet Limited
- Paysagiste : Gustafson Porter
- Plan de développement : Ernst&Young
Entreprises partenaires
Plusieurs entreprises ont décidé d’investir dans le projet Masdar City :
- La joint venture réunissant Masdar (60%) Total (20%) et Abengoa Solar (20% dont les parts ont été depuis rachetées par Masdar) a été désignée pour concevoir et exploiter la centrale solaire thermodynamique de Shams 1 (100 MW de puissance), inaugurée en mars 2013(5).
- Siemens fournit des services intégrés de technologies d'automatisation des bâtiments et développe des applications relatives au réseau électrique intelligent (Smart Grid) qui optimisera la consommation de l'énergie de la ville.
- Schneider Electric participe à un centre de R&D qui concentre les recherches sur les technologies durables pour les bâtiments et la distribution et le traitement de l’eau.
Irena
Masdar City abrite le siège de l'Agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena – International Renewable Energy Agency), première agence de cette importance basée au Moyen-Orient. Elle a vu le jour le 26 janvier 2009 afin de promouvoir la transition vers les énergies renouvelables dans le monde et fournir conseils et assistance aux pays qui cherchent à renforcer leurs capacités dans le domaine des énergies renouvelables (l'Agence a été installée dans ses locaux actuels au sein de Masdar City en juin 2015(6)).
Passé et présent
À fin 2017, les Émirats arabes unis disposaient de 97,8 milliards de barils de pétrole (soit près de 5,8% des réserves mondiales) et d'environ 5 900 milliards de m3 de gaz naturel (soit près de 3,1% des réserves mondiales) selon les dernières données du BP Statistical of World Energy. La très grande majorité de ces ressources est située dans l'émirat d'Abou Dhabi.
Au rôle majeur d’Abou Dhabi dans les hydrocarbures vient s’adjoindre l’ambition de devenir précurseur dans les énergies renouvelables. Le projet Masdar City a débuté en 2006 et été mis en œuvre par le Sultan Ahmed Al Jaber. En 2008 a été présentée la maquette de Masdar City réalisée par Foster and Partners. En 2009, il est obtenu de Ban Ki-Moon, Secrétaire général des Nations Unies, l’accord d’abriter le siège de l’Irena.
En novembre 2010, les 6 premiers bâtiments de l'Institut technologique de Masdar sont livrés. Les immeubles résidentiels affichent alors une consommation en eau inférieure de 54% et une consommation électrique en baisse de 51% par rapport à la moyenne des bâtiments émiratis similaires. Un tiers de l'électricité consommée provient des panneaux photovoltaïques installés sur les toits et les trois quarts de l'eau chaude sanitaire est produite grâce à des chauffe-eaux solaires.
L'avancée du chantier de Masdar City a été freinée par la crise de 2008 et la chute des cours du pétrole et les travaux ont été mis en sommeil au début des années 2010.
Futur
Initialement prévu en 2016, l’achèvement de Masdar City a été réévalué à l'horizon 2030. Les deux grandes installations actuellement en place sont l'Institut des sciences et des technologies (les étudiants y sont payés) et le siège de l'Irena. Masdar City est encore considérée comme une ville « fantôme » par de nombreux observateurs.
Le coût de la ville sera a priori de 10 à 15% inférieur aux prévisions, s’échelonnant entre 18,7 et 19,8 milliards de dollars au lieu des 22 milliards de dollars initialement annoncés.